Impact de l'entraînement physique sur le cerveau
PAR: VALÉRIE LEMAY
ENTRAÎNEUR-KINÉSIOLOGUE
Les bienfaits de l’activité physique sur le corps sont bien connus. Savez-vous toutefois qu’en étant physiquement actif, vous avez également le pouvoir d’influencer le développement et le fonctionnement de votre cerveau, en somme, d’améliorer vos fonctions cognitives ? Celles-ci permettent notamment de communiquer, de percevoir notre environnement, de nous concentrer, de nous souvenir d’un événement ou d’accumuler des connaissances.
CE QUE LA RECHERCHE DIT
De nombreux travaux chez l’animal et l’humain ont démontré que l’exercice physique produisait des changements positifs dans la plasticité du cerveau, ce qui a pour effet d’améliorer les fonctions cognitives et cérébrovasculaires. Ces changements peuvent être immédiats, mais peuvent aussi perdurer si l’exercice est répété à une fréquence régulière. Voici ce que certaines recherches disent sur le sujet:
À court terme, une période de 11 à 20 minutes d’activité physique induit une amélioration aiguë des fonctions exécutives, de l’attention, de la vitesse de traitement de l’information et de la mémoire. Ces mêmes bénéfices, ainsi qu’une amélioration du fonctionnement cognitif général, sont observés lorsque l’activité physique est d’intensité modérée à vigoureuse, le tout pratiqué de façon régulière. (Erickson et al., 2019)
Les changements les plus notables sur la cognition et la structure du cerveau sont observés chez les 6 à 13 ans ainsi que chez les adultes de plus de 50 ans suite à une activité d’intensité modérée à vigoureuse. (Erickson et al., 2019)
Une étude réalisée auprès d’hommes âgés de 18 à 33 ans atteints d’un TDAH (Trouble de Déficit de l’Attention/Hyperactivité) a démontré qu’une séance de 20 minutes de vélo réalisée à une intensité moyenne permettait d’augmenter le niveau d’énergie, la motivation face à un travail mental en plus de réduire le sentiment de confusion, de fatigue et de dépression (Fritz et O’Conner, 2016).
L’exercice peut contribuer à la prévention et au ralentissement de la progression de maladies neurodégénératives telles que la démence et l’Alzheimer. Une méta-analyse incluant plus de 33 000 participants a évalué une réduction du risque de déclin cognitif de 38% chez les plus physiquement actifs (Sofi et al., 2011).
Pour mieux comprendre comment l’activité physique peut impacter nos fonctions cognitives, voici quelques mécanismes bien étudiés. À noter que les mécanismes par lesquels l’exercice affecte le cerveau sont nombreux et ne sont pas tous encore bien compris, particulièrement chez l’humain. Leurs fonctionnements varieront par ailleurs selon l’âge et l’état de santé.
NIVEAU 1: CHANGEMENTS AU NIVEAU CELLULAIRE ET MOLÉCULAIRE
Lors de l’activité physique, il y a augmentation de la circulation de facteurs neurotrophiques (ou BDNF en Anglais, soit Brain-derived Neurotrophic Factor) et de facteurs de croissance circulatoires (ou IGF-1 pour Insulin-like Growth Factor). Ces facteurs sont en fait des molécules qui permettent la croissance et la prolifération de nouveaux neurones et synapses ainsi que la création de vaisseaux sanguins. Elles sont impliquées dans le développement du cerveau lors de l'enfance. À l'âge adulte, ces molécules, plus nombreuses chez une personne active, contribuent au maintien de la plasticité du cerveau. Cette plasticité peut s’avérer fort importante pour faire de nouveaux apprentissages ou lors de la récupération suite à un dommage cérébral.
Autre phénomène, la libération de neurotransmetteurs tels que la dopamine, la sérotonine et la norépinéphrine. Les neurotransmetteurs sont des messagers chimiques produits par des neurones qui envoient des messages à d’autres neurones. Ces derniers, lorsque libérés, ont un impact sur plusieurs fonctions cérébrales, les émotions et l’état général.
NIVEAU 2: CHANGEMENTS STRUCTURAUX ET FONCTIONNELS
Les changements au niveau cellulaire et moléculaire apportent des changements structuraux et fonctionnels, parmi ceux-ci, la création de nouveaux neurones dans l’hippocampe et l’augmentation de son volume sont des éléments qui jouent dans l’ amélioration de la cognition. L’hippocampe est une structure du cerveau impliquée dans l’apprentissage et la mémoire. Il est très susceptible aux maladies neurodégénératives et à un vieillissement prématuré. Avec une activité physique régulière, cette région du cerveau devient plus résiliente face aux changements imposés par l’âge.
Au niveau de la matière blanche , le volume serait plus élevé suite à une pratique régulière d’activité physique. Comme son rôle est de faciliter la transmission d’informations, les connexions entre les différentes parties du cerveau via les axones (fibres nerveuses dont elle est constituée), un volume plus important est bénéfique. Il faut aussi noter que l’activité physique aura également comme impact de minimiser les lésions dans la matière blanche qui ont naturellement un effet négatif sur les transmissions.
On note également une amélioration de la circulation sanguine au cerveau lors de la pratique d’une activité physique. Une bonne circulation est nécessaire pour amener l’oxygène et les nutriments au cerveau et ainsi, assurer un fonctionnement optimal de ce dernier.
NIVEAU 3: CHANGEMENTS COMPORTEMENTS ET SOCIO-ÉMOTIONNELS
Chez des patients avec symptômes dépressifs, on note une amélioration de l’humeur avec l’activité physique qui mène à une amélioration des fonctions cognitives. Une boucle vertueuse peut s’installer puisque l’amélioration des fonctions cognitives, suite à l’activité physique, peut également contribuer à améliorer l’humeur.
Finalement, l’activité physique peut aider à améliorer la qualité du sommeil. Du fait, elle peut contribuer indirectement à l’amélioration des fonctions cognitives puisque la qualité et la durée du sommeil jouent un rôle important dans les processus d’apprentissage et de consolidation de la mémoire; des éléments clés de nos fonctions cognitives.
À Retenir:
Vous l’aurez compris, l’entraînement, bien que physique, pourra aussi “muscler” votre cerveau. Est-il possible que Juvénal, le poète romain du premier siècle avant JC, à qui nous devons l’expression “esprit sain dans un corps sain”, ait aiguisé ses fonctions cognitives en s’entraînant avant de pondre cette maxime? Qui sait?
Chose certaine, bien que la plupart des travaux sur les effets neuroprotecteurs de l’activité physique ont étudié les effets de l'entraînement aérobie, de plus récentes recherches suggèrent que l'entraînement en résistance et les activités de coordination peuvent aussi contribuer positivement à la santé du cerveau. L’idéal serait donc de combiner ces trois modalités d’entraînement. D’autres recherches sont encore requises pour déterminer les caractéristiques (fréquence, intensité, durée) les plus bénéfiques d’un programme d’entraînement dont l’impact serait optimal pour les fonctions cognitives. Pour le moment, si vous suivez les recommandations de la Société canadienne de physiologie (voir ci-dessous), vous avez déjà un bon bout de chemin de fait.
On vous laisse avec une petite idée à tester. Avant un prochain rendez-vous d’affaires, une réunion importante, faites une séance d’entraînement. Serez-vous plus perspicace? Plus affûté? Plus sagace? On attend de vos nouvelles!
Si le sujet vous intéresse, si vous souhaitez en apprendre davantage, je vous suggère la lecture du livre Spark: The revolutionary new science of exercice and the Brain ou encore le visionnement de la conférence TED: The brain-changing benefits of exercise par Wendy Suzuki.
RECOMMANDATIONS DE LA SCPE
La Société canadienne de physiologie de l’exercice recommande, de manière générale, aux adultes (18-64 ans) de pratiquer un minimum de 150 minutes d’activités physiques aérobies d’intensité moyenne à vigoureuse par semaine, deux séances d’entrainement musculaire et plusieurs heures d’activités physiques d’intensité légère, incluant des périodes en position debout. Elle mentionne au passage que le remplacement de comportements sédentaires par plus d’activité physique, et remplacement d’activités physiques de faible intensité par plus d’activité physique d’intensité moyenne à vigoureuse, tout en maintenant une durée de sommeil suffisante, entraînera encore plus de bienfaits pour la santé.
Les directives de la SCPE ont été actualisées en octobre 2020 avec une approche prenant en compte le sommeil et la sédentarité. Les recommandations sont adaptées pour quatre groupes d’âge: enfants 0-4 ans, enfants 5-17 ans, adulte 18-64 ans et adulte 65 ans et plus. Pour un survol de cette mise à jour, l’article suivant sur le site de Radio-Canada est intéressant:
> Bouger plus, moins d’écran, mieux dormir : les nouvelles recommandations canadiennes
QUELQUES MOTS SUR VAlÉRIE
Elle commence à s’entraîner plus sérieusement lorsqu’elle découvre le Crossfit en 2011. Elle choisit par la suite d’orienter son entrainement vers le travail en force et en puissance. Elle devient compétitrice au niveau provincial et national lors de plusieurs compétitions de Strongman, puis de Powerlifting.
Sa volonté à se dépasser n'est pas que physique, puisqu'elle a complété une maîtrise et plusieurs années de travail au doctorat. La rigueur scientifique développée pendant ses études se transfère à une méthodologie d'entraînement sans faille.
Sa capacité à modeler l'entraînement à des profils variés, à prendre en compte la psychologie pour un max de plaisir, n'est pas en reste. Elle affectionne le travail avec des débutants qui accomplissent des choses qu'ils n'avaient jamais pensé possibles. Elle épaule solidement les athlètes, forte de son expérience personnelle.
Pour elle, l'accomplissement de soi passe par les victoires petites ou grandes à l’entraînement.
Formations / Affiliations: M.Sc. & B.Sc. Sciences de l'activité physique / Atelier Mike Boyle - Strength & Conditioning / Haltérophilie FQH / Formation évaluation et préparation physique INS-Université Poitiers / Optimisation du mouvement (niveau 1) - Rehab U / Cancer Exercise Specialist Advanced Certification - Cancer Exercise Training Institute / Membre de la Fédération des Kinésiologues du Québec
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Références
Physical activity, cognition, and brain outcomes: a review of the 2018 physical activity guidelines / Erickson et al., 2019
Acute exercise improves mood and motivation in young men with ADHD symptoms / Fritz et O’Conner, 2016
Physical activity and risk of cognitive decline: a meta-analysis of prospective studies / Sofi et al., 2011
¹ Graphique - Mediators of physical activity on neurocognitive function: a review at multiple levels of analysis / Stillman et al., 2016
² Graphique - 10 Neurological benefits of exercise / Juliette Tocino-Smith, 2020
Physical Activity and Brain Health / Di Liegro et al., 2019
Dose-response matters! - A perspective on the exercise prescription in exercise-cognition research / Herold et al., 2019
Systematic review and meta-analysis investigating moderators of long-term effects of exercise on cognition in healthy individuals / Ludyga et al., 2020
Effects of resistance exercise on cerebral redox regulation and cognition: an interplay between muscle and brain / Pinho et al., 2019